Tarifs des péages autoroutiers : l’Autorité de régulation des transports appelle le ministère chargé des Transports à veiller à l’intégration des externalités dans les tarifs de péage des futures concessions d’autoroute, conformément à la directive Eurovignette

Autoroutes
Actualité publiée le 7 août 2023

Saisie par le ministère chargé des transports d’un projet de décret devant parachever la transposition de la directive « Eurovignette » en droit français, l’Autorité de régulation des transports (ART) a rendu un avis dans lequel elle appelle le ministère à revoir le projet de décret pour améliorer l’efficacité du dispositif proposé et mettre en place une véritable redevance pour coûts externes, conformément aux dispositions législatives européenne et nationale applicables. Elle invite par ailleurs, dans la perspective de l’échéance prochaine des principales concessions d’autoroute, à l’engagement d’une réflexion plus générale sur la tarification des autoroutes, qu’elle entend accompagner en conduisant une étude sur le sujet.

Le projet de décret soumis à l’avis de l’ART vise en particulier, pour les futures concessions, à préciser les modalités de mise en œuvre d’une « redevance pour coûts externes liés à la pollution atmosphérique », telle que prévue par la directive Eurovignette et sa transposition en droit national. Il s’agit d’un dispositif tarifaire augmentant les montants acquittés par les poids-lourds les plus polluants, internalisant ainsi le coût des nuisances causées par la pollution atmosphérique dans les péages. Cette mise en œuvre de la règle dite du « pollueur-payeur » est en théorie vertueuse : elle incite les transporteurs à faire évoluer leurs flottes de véhicules pour en réduire les émissions et les chargeurs à privilégier des modes moins polluants pour le transport de marchandises.

Néanmoins, l’analyse de l’ART montre que, dans les faits, l’efficacité du dispositif proposé par le ministère chargé des Transports dans le cadre de son projet de décret est limitée. Ce dernier s’apparente plus à une modulation des péages qu’à une tarification de la pollution atmosphérique : la redevance payée par les poids-lourds les plus polluants vient ainsi diminuer le péage acquitté par les poids-lourds qui le sont moins et laisse finalement le péage moyen inchangé. Le dispositif ne pénalise donc pas réellement le transport routier de marchandises et n’incite pas suffisamment les usagers de l’autoroute à adapter leurs comportements. Certes, une véritable redevance pour coûts externes rendrait plus difficile l’aboutissement de projets de nouvelles concessions autoroutières, dès lors qu’elle aurait mécaniquement pour effet de réduire les recettes de péages disponibles pour financer les infrastructures et pourrait donc augmenter les subventions publiques nécessaires à l’équilibre économique des concessions. Il s’agit toutefois de la conséquence logique d’une politique visant à favoriser le report modal.

L’ART recommande donc au ministère chargé des Transports de modifier le projet de décret afin de mettre en place une véritable redevance pour coûts externes, conformément au cadre juridique applicable, permettant de parvenir à l’internalisation complète et obligatoire des coûts externes pour le transport routier de marchandises.

Au-delà, l’ART estime qu’une réflexion plus générale sur la tarification des autoroutes doit être initiée dans la perspective de l’échéance prochaine des principales concessions d’autoroute. Cette dernière offre en effet une occasion historique de repenser cette tarification, afin de concilier, dans le respect du droit européen, les enjeux de financement des investissements dans les infrastructures de transport, d’acceptabilité sociale du péage et d’incitation à une mobilité respectueuse de l’environnement. L’ART entend accompagner cette réflexion en conduisant une étude analysant les possibilités offertes par la directive « Eurovignette » en la matière.

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