L’ART valide la proposition de réduction des péages ferroviaires négociée entre SNCF Réseau et Trenitalia France pour 2022 et 2023

Ferroviaire
Actualité publiée le 7 juin 2022

L’Autorité publie ce jour un avis relatif à l’application d’une tarification négociée entre SNCF Réseau et l’opérateur Trenitalia France pour l’accès à l’infrastructure ferroviaire concernant une offre de services de transport de voyageurs à grande vitesse entre Paris et Lyon et Paris et Milan via Lyon pour les années 2022, 2023 et 2024. Dans ce cadre, elle valide la proposition de réduction des péages ferroviaires négociée pour 2022 et 2023, mais s’y oppose en ce qui concerne l’année 2024.

L’AUTORITÉ A ÉTÉ SAISIE MI-MARS D’UNE PROPOSITION DE RÉDUCTION DE LA REDEVANCE DE MARCHÉ NÉGOCIÉE ENTRE SNCF RÉSEAU ET TRENITALIA FRANCE

Le 18 décembre 2021, Trenitalia France a lancé son service de transport ferroviaire de voyageurs entre Paris et Milan via Lyon, devenant ainsi la première entreprise ferroviaire alternative à proposer des services de transport de voyageurs à grande vitesse sur le réseau ferré national. Un autre service de transport entre Paris et Lyon a été lancé à partir d’avril 2022.

Le 17 mars 2022, l’Autorité a été saisie d’une proposition de tarifs négociés entre SNCF Réseau et Trenitalia France applicables à compter du 18 décembre 2021, pour trois années. Les taux de réduction négociés s’élèvent respectivement à :

  • 37 % pour la première année ;
  • 16 % pour la deuxième année ; et
  • 8 % pour la troisième année (optionnelle).

Le droit européen[1] et le droit national[2] autorisent le gestionnaire d’infrastructure à négocier le niveau des redevances d’infrastructure avec une entreprise ferroviaire candidate à l’accès au réseau. Pour autant, comme l’Autorité a déjà eu l’occasion de le préciser[3], la tarification négociée ne doit pas contrevenir aux principes applicables à la tarification de l’accès à l’infrastructure. En particulier, elle n’est acceptable et compatible avec le principe de non-discrimination que si elle vise à corriger une différence de situation objective et transitoire entre un opérateur et d’autres opérateurs sur un même segment de marché, afin de contribuer à lever les barrières à l’entrée tarifaires et d’accompagner l’ouverture à la concurrence des services librement organisés de transport ferroviaire de voyageurs.

L’AUTORITÉ VALIDE LA PROPOSITION DE RÉDUCTION DE LA REDEVANCE DE MARCHÉ POUR LES ANNÉES 2022 ET 2023

Afin d’optimiser l’utilisation du réseau ferroviaire, considérant la différence de situation objective entre un nouvel entrant, Trenitalia France et, dans le cas d’espèce, la situation d’un opérateur installé, SNCF Voyageurs, l’Autorité a validé la tarification négociée entre SNCF Réseau et Trenitalia France pour les années 2022 et 2023, en limitant toutefois son application jusqu’à la fin de l’horaire de service 2023, soit jusqu’au 9 décembre 2023 inclus.

Le niveau de la réduction de la redevance de marché accordée à Trenitalia France a été justifié par SNCF Réseau sur le fondement d’une évaluation du différentiel de recettes pour un nouvel entrant comparativement à un opérateur installé induit par la phase de développement progressif de l’activité commerciale (également appelée phase de « ramp-up »).

L’Autorité n’a pas relevé d’erreur manifeste dans la méthodologie mise en œuvre par SNCF Réseau. Si certaines hypothèses utilisées dans le travail de modélisation auraient pu faire l’objet d’une analyse plus poussée, l’Autorité a considéré que la proposition de réduction négociée n’était, en tout état de cause, pas surestimée. En outre, l’Autorité a souligné, dans son avis, que l’effet « ramp-up » relatif au nombre de voyageurs peut s’accompagner d’un effet similaire relatif à un déploiement progressif de l’offre et de surcoûts spécifiques à l’entrée, non pris en compte dans l’estimation réalisée par SNCF Réseau. En l’espèce, l’opérateur Trenitalia France a indiqué avoir consenti des surcoûts importants et avoir été restreint dans la possibilité de proposer une offre plus importante, dans le cadre son entrée sur le marché, du fait de la mise en place des systèmes embarqués de contrôle-commande et de signalisation des lignes à grande vitesse françaises.

S’agissant de l’année 2024, l’Autorité s’est opposée à la proposition de tarification négociée dans la mesure où les tarifs d’utilisation de l’infrastructure pour le cycle 2024-2026 ne sont, à ce stade, ni connus ni a fortiori exécutoires. Une proposition de réduction de la redevance de marché négociée ne pourra lui être soumise au titre de l’année 2024 qu’une fois que les tarifs seront devenus exécutoires.

L’AUTORITÉ FORMULE DES DEMANDES DANS LA PERSPECTIVE DE SAISINES ULTÉRIEURES RELATIVES À DES TARIFICATIONS NÉGOCIÉES

Préalablement à toute nouvelle saisine et conformément aux engagements pris par SNCF Réseau, l’Autorité demande à être régulièrement tenue informée de l’avancée des négociations afin que ces dernières puissent se dérouler sous son égide. En tout état de cause, elle rappelle qu’elle doit être saisie au moins deux mois avant le début du premier horaire de service concerné par la tarification négociée.

Enfin, dans le cadre de l’exercice de sa mission de suivi de la situation de la concurrence sur les marchés des services ferroviaires, l’Autorité assurera un suivi de la montée en charge des services de Trenitalia France. À ce titre, elle demande que lui soient communiquées les données constatées relatives notamment (i) aux circulations effectives, (ii) aux taux de remplissage des trains et (iii) aux chiffres d’affaires.

 

Consulter :

 

À propos de l’Autorité de régulation des transports

Depuis 2010, le secteur ferroviaire français est doté d’une autorité indépendante qui accompagne son ouverture progressive à la concurrence : l’Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf). La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a élargi les compétences du régulateur aux activités routières – transport par autocar et autoroutes.

Le 15 octobre 2015, l’Araf est devenue l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), avec la mission de contribuer au bon fonctionnement du service public et des activités concurrentielles, au bénéfice des clients des transports ferroviaire et routier.

Compétente pour la régulation des redevances aéroportuaires depuis le 1er octobre 2019, l’Arafer est devenue l’Autorité de régulation des transports (ART) à cette date. Enfin, la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités a étendu les compétences et missions de l’Autorité à l’ouverture des données de mobilité et de billettique, ainsi qu’à la régulation des activités de gestionnaire d’infrastructure et des activités de sûreté exercées par la RATP en Île-de-France.

Ses avis et décisions sont adoptés par un collège composé de cinq[4] membres indépendants choisis pour leurs compétences économiques, juridiques ou techniques dans le domaine des services numériques ou du transport, ou pour leur expertise des sujets de concurrence. Il est présidé depuis août 2016 par Bernard Roman.

[1] Article 56-6 de la directive 2012/34/UE.

[2] Article L. 2133-2 du code des transports.

[3] cf. Avis n° 2016-168 du 7 septembre 2016 relatif à la redevance de réservation négociée entre SNCF Réseau et SNCF Mobilités sur la section de la ligne à grande vitesse Atlantique située entre Courtalain et Monts et n° 2020-016 du 6 février 2020 relatif à la fixation des redevances d’infrastructure liées à l’utilisation du réseau ferré national pour les horaires de service 2021 à 2023 (cf. https://www.autorite-transports.fr/avisdecision).

[4] La loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités a acté une transformation de la gouvernance du collège de l’Autorité qui passera progressivement à cinq membres permanents (les deux membres vacataires actuels termineront leur mandat et ne seront pas remplacés).