La proposition de loi ordinaire comporte deux innovations majeures. D’une part, elle établit, en annexe, une liste des autorités administratives et publiques indépendantes. Jusque-là, estimées à 41, selon le recensement réalisé par Légifrance, leur nombre a été réduit à 26.
L’article 1 de la proposition de loi organique précise en parallèle que « toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante est instituée par la loi ».
Dans le détail, sont énumérées 19 autorités administratives indépendantes :
L’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (Acnusa) ;
L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) ;
L’Autorité de la concurrence ;
L’Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) ;
L’Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) ;
L’Autorité des marchés financiers (AMF) ;
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ;
Le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) ;
La Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) ;
La Commission du secret de la défense nationale (CSDN) ;
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) ;
La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) ;
La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) ;
La Commission nationale du débat public (CNDP) ;
La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) ;
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) ;
Le Défenseur des droits (DDD) ;
Le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) ;
La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).
S’y ajoutent 7 autorités publiques indépendantes (dotées, à la différence des premières, de la personnalité morale distincte de l’Etat) :
L’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) ;
L’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) ;
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) ;
La Haute Autorité de santé (Has) ;
La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) ;
Le Haut Conseil du commissariat aux comptes (H3C) ;
Le Médiateur national de l’énergie.
Quinze autorités disparaissent ainsi par rapport à la liste établie par Légifrance : l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le Bureau central de tarification (BCT), le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), la Commission centrale permanente compétente en matière de bénéfices agricoles, la Commission des infractions fiscales, la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale relative à l’élection du président de la République, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), la Commission nationale d’aménagement commercial (CNA Commercial), la Commission nationale d’aménagement cinématographique (CNA cinématographique), la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), la Commission des participations et des transferts, la Commission de la sécurité des consommateurs (CSC), la Commission des sondages, le Conseil supérieur de l’Agence France-Presse et le Médiateur du Cinéma.
D’autre part, la proposition de loi ordinaire définit un statut général pour ces 26 autorités administratives et publiques indépendantes. Ce tronc commun de règles est applicable aux membres des collèges et, lorsqu’elles existent, des commissions de ces autorités sont investies d’un pouvoir de sanctions.
Trois autorités y font exception dans la mesure où elles ne sont constituées que par une seule personne : le Défenseur des droits, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et le Médiateur national de l’énergie. Les dispositions relatives au président d’une AAI s’appliquent toutefois à ces trois personnes, qui sont en outre chargées d’établir le règlement intérieur de l’institution ; il incombe en outre au Médiateur de l’énergie d’établir le budget de l’API sur proposition du directeur général. Le titre III de la proposition de loi organique modifie le premier alinéa de l’article 2 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits pour préciser que celui-ci est une autorité administrative (et non plus constitutionnelle) indépendante qui ne sollicite (au lieu de « ne reçoit ») « dans l’exercice de ses attributions, aucune instruction ».
Les mandats des membres
Les membres des AAI et API exercent un mandat non révocable, renouvelable une fois (sauf remplacement de fin de mandat inférieur à deux ans), d’une durée comprise entre trois et six ans. Par dérogation, le mandat des députés ou des sénateurs membres d’une de ces autorités prend fin avec la cessation de leur mandat de député ou de sénateur.
A noter que les mandats débutés avant l’entrée en vigueur de la présente loi sont pris en compte pour l’application de la possibilité pour un président d’une autorité administrative ou publique indépendante d’être renouvelé.
En cas d’empêchement à exercer les fonctions de membre du collège, le mandat peut être suspendu, pour une durée déterminée, soit à la demande du membre concerné, soit par le collège, à la majorité des trois quarts des autres membres, sur proposition de l’un d’entre eux. Il ne peut être mis fin aux fonctions d’un membre du collège qu’en cas de démission ou sur proposition du président ou d’un tiers des membres du collège, après délibération à bulletin secret hors la présence de l’intéressé, à la majorité des trois quarts des autres membres du collège que l’intéressé, constatant un manquement grave à ses obligations légales ou une incapacité définitive empêchant la poursuite de son mandat. Cette délibération ne peut intervenir qu’après que l’intéressé a été en mesure de produire ses observations dans un délai qui ne peut être inférieur à une semaine. Il est pourvu au remplacement des membres huit jours au moins avant l’expiration de leur mandat ou dans les soixante jours suivant le décès ou la démission volontaire ou d’office d’un membre. A défaut de nomination d’un nouveau membre à l’expiration de ces délais, le collège de l’autorité, convoqué à l’initiative de son président, propose, par délibération, un candidat à l’autorité de nomination, dans un délai de trente jours.
En matière de parité, la proposition de loi ordinaire prévoit un régime dérogatoire pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques : le mandat de ses membres nommés au titre d’un renouvellement partiel de l’année 2017 peut être renouvelé une fois ; les membres qui leur succèdent, à l’issue de leur mandat, sont une femme et un homme et sont nommés jusqu’au renouvellement prévu après le 30 avril 2025. Lors du premier renouvellement de la commission suivant le 30 avril 2020, le vice-président du Conseil d’Etat propose une femme ; les premiers présidents de la Cour de cassation et de la Cour des comptes proposent, pour l’une, deux femmes et un homme et, pour l’autre, une femme et deux hommes.
Les régimes d’incompatibilités
A l’exception des députés et sénateurs, le mandat de membre d’une autorité administrative ou publique indépendante est incompatible avec la plupart des fonctions électives : maire, maire d’arrondissement, maire délégué, adjoint au maire, président et vice-président d’un établissement public de coopération intercommunale, président de conseil départemental, président de la métropole de Lyon, président de conseil régional, président et vice-président d’un syndicat mixte, président du conseil exécutif de Corse, président de l’Assemblée de Corse, président de l’assemblée de Guyane ou de l’assemblée de Martinique, président du conseil exécutif de Martinique, président de l’organe délibérant de toute autre collectivité territoriale créée par la loi, président de l’Assemblée des Français de l’étranger, membre du bureau de l’Assemblée des Français de l’étranger, vice-président de conseil consulaire, vice-président de l’organe délibérant ou de membre de l’organe exécutif d’une collectivité territoriale susmentionnée, président de conseil territorial, président de l’assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna, président de la Polynésie française, président de l’assemblée de la Polynésie française, président du congrès de Nouvelle-Calédonie, président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, président d’une assemblée de province de Nouvelle-Calédonie.
Il existe en plus des incompatibilités professionnelles : chef d’entreprise, gérant de société, président ou membre d’un organe de gestion, d’administration, de direction ou de surveillance. S’agissant des magistrats de l’ordre judiciaire, administratif ou financier, il est précisé que « lorsque la loi prévoit la présence au sein du collège d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante de membres désignés parmi les magistrats en activité, il ne peut être désigné d’autre membre en activité du même corps, à l’exclusion du président de l’autorité concernée ». Les membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) ne peuvent y siéger, pas plus que les membres du Conseil économique, social et environnemental (Cese) sauf à être désigné en cette qualité pour ces derniers.